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26 septembre 2009

Portrait détourné

Lavier_Bertrand__mademoiselle_Gauducheau__1981__Placards_m_talliques_peints___l_acrylique__MNAM

Bertrand Lavier, Mademoiselle Gauducheau, 1981, acrylique sur métal, 195 x 91 x 50 cm, MNAM, Paris

Portrait détourné

Ce n’est rien d’autre qu’un vestiaire repeint dans sa couleur d’origine. La pâte épaisse de peinture change le meuble dans son aspect général au point d’en faire une sorte de « tableau » en trois dimensions. Cet objet fonctionnel au design un peu désuet convoque l’univers laborieux d’une petite entreprise des années 50. Le titre renvoie explicitement à son propriétaire de l’époque. Mademoiselle Gauducheau a certainement existé et l’authenticité indéniable de cet objet en manifeste le dérisoire fondement. L’objet a simplement été récupéré, recyclé, détourné de son usage et de son cadre initial. Il acquiert ainsi un nouveau statut ; il vient rendre une sorte d’hommage à titre posthume.

Ce meuble repeint est le portrait d’une employée au casier numéro 852. A travers cet objet personnel, Bertrand Lavier réalise le portrait d’une anonyme bien nommée, qui pourrait être n’importe qu’elle salariée d’une petite entreprise française des années 50. C’est le portrait d’une demoiselle oubliée de tous, dont il ne resterait que ce vestige. Ce meuble renferme symboliquement ses effets personnels et identitaires, ceux que jour après jour elle laissait justement au vestiaire pour devenir cette employée anonyme.

Ce meuble a été détourné en tableau, en portrait par le simple effet de la facture picturale associée au titre de l’œuvre. Cette pâte colorée et ce nom suffisent à dématérialiser l’objet, parviennent à le personnifier, à le faire basculer du côté de la représentation, de la fiction. Ce n’est plus un meuble, c’est une image, une métaphore. Aucune image n’aurait mieux évoqué le morne quotidien de cette demoiselle Gauducheau.

Par l’extrême économie de moyens mis en œuvre, l’artiste réalise avec efficacité une sorte de vanité contemporaine, un objet qui force à reconsidérer notre vaine condition de passagers de monde.

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